Dépassés par le sanglier

Le sanglier est au centre des préoccupations de plusieurs groupes d’acteurs : agriculteurs, éleveurs, chasseurs et même ornithologues – qui voient les oiseaux nicheurs au sol menacés par cet omnivore. Une espèce qui est en surpopulation impacte toute la chaine, pas que les humains.

Les responsables étatiques se soucient des potentiels risques sanitaires (comme l’apparition de la Pest porcine africaine au Nord-Est de la France) jusqu’ici anecdotiques mais qui pourraient se répandre si les populations ne sont pas suffisamment régulées.
À l’heure actuelle ce sont les montants des dégâts des sangliers (ceux sur les vignes par exemple) dont les effets financiers sont au centre des discussions.

En Suisse, ce sont les cantons qui gèrent la faune en s’aidant des chasseurs (le canton de Genève étant le seul sans chasseurs), c’est donc l’État qui doit payer les indemnités aux agriculteurs.
En France, la gestion étant confiée aux chasseurs, ce sont eux qui doivent payer les factures. Depuis quelques années les frais des compensations des dégâts de sangliers sont tels que les rentrées financières des permis de chasse ne permettent plus de compenser tous les dégâts dans certains départements. Les tensions montent. Les paysans ont le sentiment que leur travail n’est pas suffisamment considéré ; les chasseurs voient des parcelles fermées à la chasse qui permettent aux sangliers de se reproduire à souhait et les mouvements de protection dénoncent l’agrainage fait pour engraisser les sangliers.

La reproduction de cette espèce dépend en effet de l’alimentation. Une laie peut faire jusqu’à sept petits par année si les conditions sont clémentes (nuits pluvieuses en été pour que les vers remontent, belle glandée en automne et hiver doux). Lors d’une telle année la population peut être quatre fois plus grande qu’après une mauvaise année où la mortalité est parfois de 60%. Avec le réchauffement des hivers que l’on constate ces dernières années, cette espèce a explosé : les populations doublant parfois en 4 mois !

Même si des erreurs ont été faites dans le passé, aujourd’hui les grains de maïs donnés aux suidés par les chasseurs n’ont plus pour but d’augmenter les populations à chasser. Cet agrainage a pour objectif de garder les sangliers dans les forêts pour préserver les cultures et tenter de limiter les frais des dégâts à rembourser.
Dans plusieurs régions, les chasseurs sont dépassés par cette régulation intensive qu’ils doivent réaliser. Dans certaines zones l’importance des tirs est telle que les passionnés de sanglier sont débordés. Sans parler des louvetiers qui doivent sortir régulièrement sur le terrain pour réguler cette espèce afin de tenter de limiter les dégâts. À savoir que des chasseurs locaux, connaissant bien leur territoire et habitués à chasser avec leurs chiens, sont souvent plus efficaces que des battues administratives organisées sous demande du préfet. Dans certaines zones la chasse à l’affût ne suffit largement pas : il faut du monde pour éviter de voir partout des sangliers ! Toutes les grandes cultures font la joie du cousin du cochon et il est clair que les grandes monocultures lui sont bénéfiques. Cependant, les petits paysans aussi subissent sa gourmandise et des éleveurs voient leurs pâturages labourés et toute la filière est impactée (vaches, chevaux, ovins, etc.). Cela peut avoir des conséquences dramatiques lorsqu’ils ont déjà du mal à joindre les deux bouts…

En France certains crient de voir des dérogations donnée par des préfectures pour que des tirs de régulation soient réalisés par des chasseurs isolés. D’autres ont peur d’imaginer que la chasse en battue soit largement ouverte cet été pour limiter le sanglier. La réalité est que les laies mettent bas en ce printemps 2020 et que dans deux ans il sera encore question de tirer le surplus que les petits de ces femelles produiront… Et cette année qui pourra payer les dégâts en France ? Je ne crois pas qu’une seule Fédération départementale de chasseurs le pourra…

Alors on en dit quoi ?